USCOFEPCI Non classé Des conditions de travail décentes pour les marins de Côte d’Ivoire

Des conditions de travail décentes pour les marins de Côte d’Ivoire

SYMAPECI

Dans leur combat pour faire valoir leur visibilité, les membres de l’USCOFEP-CI soutiennent également les marins, autre maillon essentiel de la chaîne d’approvisionnement en produits de la mer.

Abidjan, Mars 2022. Parfaitement au fait des dispositions légales au niveau national et des conventions internationales visant à garantir des conventions de travail décentes aux marins, le Syndicat des Marins Pêcheurs de Côte d’Ivoire (SYMAPECI) œuvre chaque jour à faire valoir les droits des marins sur les navires de pêche.

En 2007, suite à une réunion tenue entre la Commission européenne et le secteur thonier européen, les associations thonières européennes ont signé un protocole par lequel elles s’engagent à garantir aux marins ACP employés sur les thoniers senneurs européens le minimum salarial recommandé par l’Organisation Internationale du Travail (OIT), à compter du 1er janvier 2007, et ce de manière rétroactive. Jusqu’à cette date, les dispositions de la Convention Maritime de l’OIT[1] ne s’appliquait pas aux navires affectés à la pêche ou à une activité analogue, sauf « disposition contraire expresse », et ne concernait donc que les marins affectés à la marine marchande.

Autre avancée vers des salaires décents des marins pêcheurs, les associations thonières européennes signataires du protocole se sont également engagées à supporter les cotisations sociales (maladie, cotisations retraites) de tous les marins.

Pourtant, aujourd’hui, en 2022, on est loin du compte. Contrats de travail à l’appui, la SYMAPECI démontre que les salaires ne sont pas toujours conformes aux engagements pris. A la date de cet article, le salaire d’un marin devrait être au minimum de 641 US dollar, un montant qui devrait être revalorisé en juillet 2022 à 648 US dollar suite à une décision de l’OIT[2].

Autre fait préoccupant, la sécurité sociale des marins. Rendu à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS) de Côte d’Ivoire, les représentants de la SYMAPECI ont trouvé des comptes vides, preuve irréfutable qu’en dépit du protocole de 2007, aucune cotisation n’avait été payée pour les marins. « Les équipages sont vieillissants, les marins commencent à prendre leur retraite, mais arrivés à la CNPS, ils n’ont droit à aucune pension car on leur dit qu’ils n’ont pas cotisé », explique Nicolas de Paul Klah, membre actif du syndicat. Suite à leurs demandes, une enquête aurait été ouverte par la CNPS pour comprendre l’origine du problème.

En plus d’être à pied d’œuvre pour soutenir des conditions de travail décentes pour les marins, la SYMAPECI s’inscrit également comme un acteur engagé auprès des femmes de l’USCOFEP-CI pour promouvoir une pêche durable, inclusive, et gérée de manière transparente. Leur position stratégique en mer leur permet de surveiller les activités en mer, et de lancer l’alerte en cas d’infraction à la législation en vigueur. « Nous avons plusieurs fois signalé des incursions de navires de pêche chinois dans les zones réservées à la pêche artisanale. Ils viennent aussi détruire les filets des pirogues », explique le Capitaine Dakoury, Secrétaire Général de la SYMAPECI. Pour lutter contre ces pratiques qui menacent la durabilité du secteur, la SYMAPECI et l’USCOFEP-CI projettent de s’associer pour créer un comité conjoint de surveillance côtière, pour sensibiliser les pêcheurs aux pratiques de pêche responsable et pour soutenir les autorités à lutter contre les infractions des navires de pêche étrangers pêchant dans les eaux ivoiriennes.


De nombreux enjeux, pour lesquels la SYMAPECI s’engage aux côtés des marins avec des actions et propositions concrètes :

1) Après plusieurs campagnes de sensibilisations et de dialogue avec les compagnies thonières, la SYMAPECI d’apprête à effectuer en 2022 un nouveau voyage pour rencontrer les compagnies thonières directement au niveau de leur siège, en France et en Espagne, afin de plaider pour l’application des engagements pris dans le protocole de 2007.

2) La SYMAPECI appelle les autorités ivoiriennes à soutenir le syndicat dans l’organisation de formations de renforcement de capacités pour les marins, dans le cadre de l’appui sectoriel[3] perçu par la Côte d’Ivoire au titre de l’accord de pêche entre le pays et l’Union Européenne et du protocole relatif à sa mise en œuvre[4]. Le syndicat sollicite l’appui de l’Union Européenne pour appuyer ce plaidoyer lors de la prochaine séance de la commission mixte en charge de suivre la mise en œuvre du protocole.

3) La SYMAPECI et l’USCOFEP-CI font valoir leur droit à l’information dans le contexte de l’accord de pêche entre la Côte d’Ivoire et l’Union Européenne, en particulier relativement à l’utilisation de l’appui sectoriel, institué « dans le cadre de ses réformes et destiné à appuyer, en priorité, les fonctions clés pour la durabilité des pêches (recherche halieutique, conservation dans les Aires marines protégées -AMP et surveillance des pêches) et la gouvernance sectorielle (transparence, plans d’aménagement des pêcheries, consultation des groupes d’intérêt, développement local du secteur, etc.) » [5]


Nous, SYMAPECI et l’USCOFEP-CI exhortons l’Union Européenne à appuyer les actions et plaidoyer de nos structures, y compris nos propositions concrètes auprès des autorités ivoiriennes, ainsi qu’à soutenir les organisations professionnelles à jouer un rôle dans la gestion de l’accord de pêche de manière représentative pour le secteur.

Jusqu’à aujourd’hui, ni l’USCOFEP-CI, qui regroupe plus de 30 coopératives à travers la Côte d’Ivoire, ni la SYMAPECI et ses près de 10 000 adhérents n’ont été associés aux consultations pour la mise en œuvre de l’accord de pêche et dans la planification de l’appui sectoriel.


[1] Convention du travail maritime, 2006, telle qu’amendée (MLC, 2006) (Entrée en vigueur: 20 août 2013)

[2] Selon une résolution de l’OIT, depuis le 1er janvier 2021, le salaire minimum de base des marins a été revalorisé à 641 US dollar. En 2021, la sous-commission sur les salaires des gens de mer de la Commission paritaire maritime a décidé d’une revalorisation de ce salaire minimum à 648 US dollar à compter de juillet 2022.

[3] Rappelons que l’appui sectoriel, partie de la contribution financière payée par l’UE à la Côte d’Ivoire dans le cadre de l’accord de pêche 2018-2024 qui lie les deux pays, contribue à la mise en œuvre du Plan Stratégique de Développement de l’Élevage, de la Pêche et de l’Aquaculture de la Côte d’Ivoire. Il a pour objectif la gestion durable des ressources halieutiques continentales et maritimes.

[4] Accord de partenariat dans le secteur de la pêche entre la République de Côte d’Ivoire et la Communauté européenne https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX:22008A0222(03)

[5] Guide pratique des négociations des accords de pêche pour les états membres de la commission sous-régionale des pêches, CSRP/PRCM avec l’appui de la MAVA (2020)

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